Apprentissage par enquête et Pédagogie inversée

«C’est le rôle de la prospective que de ne pas minimiser les tensions et les dangers futurs
au nom d’un optimisme de convention. Mais l’anticipation se veut aussi une incitation à l’action.
En cela, elle ne saurait non plus céder au pessimisme.»
Vers les sociétés du savoir, Rapport mondial de l’UNESCO, 2005

Dernièrement, une personne dans mon entourage professionnel m’a fait grandement réfléchir à propos de la grande importance que l’on accorde en éducation au spécialiste, à l’expert à qui on accorde le monopole du savoir. On aura pu constater, il y a quelques mois, dans le cadre du débrayage des étudiants, à quel point cette notion est aussi amplement ancrée dans le paysage médiatique. En effet, combien de fois a-t-on lu ou entendu des journalistes et des animateurs dire : «donner des cours», «assister à des cours», «manquer des cours». Comme si le savoir du prof était la seule source du Savoir, le seul gage de réussite, comme s’il était le seul détenteur de la science qui mène aux apprentissages réussis.  Ceci m’a porté à me demander quel impact cette perception répandue avait dans la salle de classe.

Qu’on ne se méprenne pas! Je ne suis pas en train de vouloir réduire l’importance du rôle du maître en classe,  j’allègue que le rôle de l’enseignant peut et doit être redéfini en fonction des exigences du XXIe siècle, car le «maître» n’est plus le seul en classe à posséder le savoir sur tout. Il doit trouver l’humilité de partager ce rôle d’«expert». À titre d’exemple, on peut prévoir que l’arrivée massive des TNi va être accompagnée de bien des crises existentielles. En effet, un enseignant qui, jusque là était considéré comme l’expert et le responsable de tout savoir en classe,  ne voudra pas de ce tableau blanc avant d’en avoir maîtrisé parfaitement le fonctionnement, sans s’être dûment pratiqué au préalable, de peur de «perdre la face» et sa crédibilité devant les élèves. Ceci s’avère problématique car, dans le domaine des technologies, un enseignant, même s’il est assez à l’aise, ne pourra jamais égaler la compétence de certains de ses élèves qui sont à la fine pointe technologique. De toute façon, est-ce vraiment souhaitable ou nécessaire ?

C’est ici que la notion de partage d’expertise et de réelle interactivité prend toute son importance. C’est ici que l’enseignant cesse de se cloisonner dans le monde des assertions, qu’il renonce à étaler sa science et commence à se questionner et à questionner, c’est ici qu’il décide d’agir comme médiateur et mentor à l’égard de ses élèves. Pour grandir professionnellement, il  est fondamental d’accorder beaucoup plus d’importance à l’observation participante et au questionnement orientant.

Comme l’a avoué si candidement Mark Prensky lors d’une présentation récente,  Conférence Natif du numérique : «D’où viennent mes idées?… On me dit : « Prensky, il n’est pas savant, il n’a pas de doctorat… d’où viennent ses idées? »… Je regarde…  j’écoute… et je pense.. je pense beaucoup… j’essaie de voir l’éducation du point de vue des élèves…».

A
Construire ses savoirs, ce n’est pas synonyme de recevoir LE savoir

Dans le milieu de l’éducation, il est beaucoup question présentement de pédagogie inversée (Flipped Classroom).

Jacques Cool (@zecool), technopédagogue de renom au Nouveau-Brunswick, a fait un relevé de sites Web où il est question de cette approche qu’il a partagé généreusement dans sa banque de signets Diigo.

Malgré un intérêt pour la pédagogie inversée qui semble croissant, il faut demeurer prudent pour ne pas tomber dans le panneau de la «tendance dernier cri», de la mode passagère. Il faut se méfier d’un détournement vers l’enseignement frontal à distance (du type ‘j’enregistre la leçon sur support vidéo, je partage le clip sur iTunes ou sur Youtube, mes élèves l’écoutent et le lendemain on en discute’). Même si la pédagogie inversée est une façon de faire porteuse qui semble avoir beaucoup de mérite et qui est pleine de potentiel, il est préférable d’éviter qu’elle occupe tout l’espace éducatif. Elle pourrait risquer de placer l’enseignant dans un espace d’expertise absolu,  et le cantonner dans le rôle de celui qui propulse ses élèves vers le savoir (au lieu de celui qui les guide). Le risque de dérive semble élevé. À titre de preuve, un article de Alain McKenna qui tend à soutenir cette vision.

Il faut accroître sa vigilance pour ne pas se limiter  à des approches exclusivement cliniques*. C’est un risque réel avec l’importance accrue accordée présentement à l’enseignement explicite. Je suis de ceux qui croient que cette forme d’enseignement, si elle ne s’insère pas dans le cadre plus large de séquences d’apprentissages, contenues dans un enseignement stratégique ou, mieux encore, dans le cadre d’un projet, finira par être réductrice à l’extrême. Plusieurs ténors de l’enseignement explicite parlent de modelage comme si les élèves/apprenants étaient de la pâte à modeler. Ils ne voient plus ces derniers comme les anciens qui, eux, croyaient que leurs disciples n’étaient que des vases à remplir mais ils les voient, ce qui est ma foi plus terrifiant, comme des vases à sculpter. Les élèves/apprenants ne sont pas plus à remplir, puisqu’il ont déjà un contenu expérienciel (décuplé lorsqu’on les place en situation de réseautage) qu’ils ne sont à sculpter, puisqu’ils ont déjà une forme en chacun d’eux. Toute abstraction de ces faits mène à l’affrontement entre « celui-qui-sait » et celui qui « sent-qu’on-ne-tient-pas-compte-de-ce-qu’il-sait/est ».

À quoi ce type de situation peut-il mener sinon à l’exclusion et au décrochage ? Le temps n’est-il pas venu de mettre fin au colonialisme intellectuel ?

Aider les jeunes à formuler des questions plutôt que de les endiguer dans des réponses toutes faites

La pédagogie inversée a été rendue populaire par la Khan Academy. Elle vise à offrir un cadre de questionnement. Les élèves-apprenants ayant la veille lu/vu/entendu la leçon dans le cadre d’une leçon assignée devant être suivie à la maison, se présentent le lendemain à l’école préparés avec des questions d’éclaicissement, des demandes de clarification. Leur enseignant, lui, arrive avec des questions visant à déterminer ce qui est compris et ce qui ne l’est pas. Ainsi, les élèves/apprenants sont placés devant une réflexion potentiellement éclairante plutôt que devant un gavage de données plus ou moins agréables à ingurgiter, plus ou moins faciles à digérer. Voilà en quoi consiste essentiellement la pédagogique inversée. Que pourrait-on faire pour pousser plus loin cette approche ? Que se passerait-il si les élèves/apprenants étaient soumis à une problématique plus large, également plus complexe qui leur permettrait d’arriver avec leurs propres représentations, leurs propres modèles ? Que pourrait-on faire par la suite en classe avec cette mosaïque de connaissances (justes, alternatives ou même erronées) ? L’enseignant pourrait les accompagner pour qu’ils déconstruisent, ajustent, reformulent afin de, comme le disait Jean Rostand, «les séduire au vrai**» . Ainsi, on parviendrait à un construit de savoirs pas juste basés sur les connaissances transmises la veille par l’enseignant, mais également sur l’expérience désormais reconnue des apprenants.

Cette façon de faire ne constitue-t-elle pas la base de l’apprentissage signifiant et significatif ? L’échafaudage d’une véritable école 2.0 ? L’enseignante-blogueuse Shelley Wright évoque cette option dans un article, Flipping Bloom’s Taxonomy, publié sur le site Powerful Learning Practice qui place la créativité au cœur des préoccupations pédagogiques.

L’apprentissage par enquête combiné à la pédagogie inversée

L’apprentissage par enquête suppose une approche axée sur la complexité des apprentissages. Bien qu’il soit sage de distinguer préalablement ce qui est compliqué de ce qui est complexe, on se doit d’être conscient que ce type d’approche n’est ni facile, ni simpliste, et qu’elle exige de l’enseignant un fort niveau d’assurance personnelle et un grand degré de confiance envers ses élèves.

Une recherche faite par Caroline Ladage et Yves Chevallard en 2010 «met en avant les difficultés auxquelles se heurte une pédagogie de la connaissance par l’enquête, essentielle au citoyen aujourd’hui, notamment dans le domaine de l’éducation au développement durable. Ils y disent, entre autres, ceci : «Dans un monde façonné par une éducation intellectuelle incomplète, les habitus rétrocognitifs font obstacle à l’adoption nécessaire du mode d’étude proactif, crucial dans l’activité intellectuelle libre.»

Malgré un indice de difficulté plus élevé, la pédagogie par enquête favorise la proactivité des apprenants. Plus le problème qui sera soumis sera large et complexe, plus les chances de toucher les intérêts réels des apprenants seront grandes. Si on encourage les jeunes à enquêter  pour trouver des réponses, ils pourront ensuite confronter leurs idées sur la place publique qu’est la salle de classe et aussi dans l’espace public virtuel que constituent les réseaux sociaux.

Le schéma ci-dessus est une adaptation d’un graphique trouvé sur le site de Will Richardson. Il indique à quel point l’école choisit trop souvent des approches et des solutions pour éloigner l’élève, non seulement de ses intérêts véritables, mais aussi des apprentissages qui sont pertinents à un apprenant de l’ère 2.0.

Il importe donc de ramener le balancier vers le centre, de redonner à la salle de classe un visage propice auquel les apprenants pourront souscrire. Si ce changement ne se produit pas, il est possible de s’imaginer que le nombre de jeunes désabusés par le système scolaire ne cessera pas de croître.

Source Wikipedia

À titre d’exemple, il serait possible de proposer à des élèves du secondaire la lecture guidée du texte de la pièce de théâtre Roméo et Juliette dans le cadre d’un cours de français. Cela leur permettrait d’apprendre  comment la prose et la poésie s’y prennent pour traiter des conflits et du phénomène des clans. Si la première activité est liée au texte original de William Shakespeare, il y a peu de chances pour que les élèves se sentent interpellés. Si, par contre, l’activité de départ consiste en une enquête sur le phénomène des gangs de rues, il y a bien des chances pour que les élèves s’y intéressent vivement et qu’ils veuillent trouver dans les différents médias des slams, des films, et même des comédies musicales ayant abordé ces thèmes. Ainsi, par la suite, ils pourront débattre vraiment outillés des mérites de la forme et du style de leurs découvertes, tant sur le plan de l’effet esthétique que sur celui de la richesse de la langue. La mise en commun de leurs découvertes deviendrait alors une source de conversations pédagogiques nourrissantes entre les divers apprenants… un reflet de leur réelle compréhension… individuelle et collective.

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* On peut dire qu’il s’agit présentement d’une tendance lourde en éducation, catéchisée grandement par certains acteurs influents du milieu de l’adaptation scolaire.
** «Dans l’enseignement qu’on distribuera aux jeunes citoyens, s’interdire toute pesée confessionnelle ou philosophique, former les esprits sans les conformer, les enrichir sans les endoctriner, les armer sans les enrôler, leur communiquer une force dont ils puissent faire leur force, les séduire au vrai pour les amener à leur propre vérité, leur donner le meilleur de soi sans attendre ce salaire qu’est la ressemblance : qui ne voit la difficulté de suivre à la rigueur un tel programme, mais en est-il un autre pour satisfaire une conscience ombrageuse quant au respect des âmes ?»
Jean Rostand, Discours de réception à l’Académie française

Le rôle du conseiller pédagogique au collégial

Il ressort des descriptions officielles de leur fonction que les conseillers pédagogiques, tous ordres d’enseignement confondus, exercent leur activité à la fois auprès du personnel cadre et du personnel enseignant des établissements scolaires, parfois également auprès du personnel professionnel. Ils agissent en tant que consultants, animateurs, coordonnateurs, chercheurs, évaluateurs, développeurs… comme on peut le déduire de la description de la fonction sur le site Mon emploi (2003, données de Emploi-Québec (GRICS, 2001)) et dans la Classification nationale des professions (Développement des ressources humaines Canada (DRHC, 2001)).

Selon Emploi Québec, la personne conseillère pédagogique est celle qui «renseigne et conseille la direction et le personnel enseignant des établissements scolaires sur les programmes d’enseignement, l’organisation des cours et le choix des méthodes d’enseignement et du matériel scolaire. Elle s’occupe, entre autres, de l’évaluation continue des programmes et méthodes, du perfectionnement du personnel enseignant et des rencontres avec celui-ci. Elle veille à apporter tout le soutien nécessaire au personnel enseignant et s’efforce d’être à l’affût des changements et innovations pédagogiques afin de favoriser le développement et la qualité de l’enseignement». (GRICS, 2001)

Selon la Classification nationale des professions, les conseillères et conseillers pédagogiques appartiennent à la profession « Agents/agentes de programmes, recherchistes et experts-conseils/expertes-conseils en politiques de l’enseignement » (DRHC, 2001). Cette classification propose divers exemples d’appellation pour l’emploi, entre autres : agent de politiques d’enseignement, agent de programmes d’enseignement, conseiller pédagogique, coordonnateur de l’éducation spécialisée, de programmes d’enseignement ou de programmes d’extension des services éducationnels, élaborateur de programmes d’études, planificateur de programmes d’études, recherchiste en enseignement et superviseur de politiques d’enseignement. Ces personnes exercent une partie ou l’ensemble des fonctions suivantes :
o « Effectuer des recherches, rédiger des rapports et des politiques, et gérer des programmes d’éducation;
o Évaluer les programmes d’étude et recommander des améliorations
o Déterminer la structure, le contenu et les objectifs des nouveaux programmes
o Effectuer des analyses statistiques en vue de déterminer les coûts et l’efficacité des politiques et des programmes d’éducation
o Fournir des services permanents de perfectionnement professionnel, de formation et de consultation aux enseignants et aux autres professionnels dans l’ensemble des secteurs public et privé
o Élaborer le matériel d’enseignement et d’autres ressources en vue de l’enseignement
o Faire des exposés lors de congrès, d’ateliers et de colloques
o Surveiller, s’il y a lieu, le travail d’autres agents de programmes, recherchistes et experts-conseils en politiques de l’enseignement
o Administrer, s’il y a lieu, des programmes de tests et d’évaluation
spécialisés. » (DRHC, 2001)

Ces données concernent tous les ordres d’enseignement comme nous l’avons dit précédemment. Ce qui suit précise la description de la fonction à l’ordre collégial. Le système de classification des emplois des collèges (CPNC, 1989, 2000) regroupe dans la catégorie de professionnels, des emplois qui exigent normalement un diplôme universitaire terminal de premier cycle. La « définition de l’emploi-type de professionnel », décrit les tâches de cette personne ainsi : elle est chargée de réaliser des objectifs, des politiques et des programmes définis par le collège selon certains standards, en ayant le choix des moyens, des méthodes et des processus d’intervention. Pour ce faire, elle conseille le personnel cadre concerné par le secteur d’activités où elle œuvre, elle peut être appelée à participer à des études ou des travaux à l’intérieur d’équipes multidisciplinaires et elle coordonne et participe aux travaux menant à la réalisation des programmes d’activités dont elle est chargée.

La fonction de conseillère ou de conseiller pédagogique au collégial
Les conseillères et les conseillers pédagogiques sont chargés plus spécifiquement de « fonctions de conseil, d’animation, de support et de rétroaction auprès du personnel cadre responsable des services d’enseignement, auprès des enseignants et des autres professionnels. Ces fonctions s’exercent relativement aux dimensions suivantes :
o l’implantation, la coordination, le développement et l’évaluation des programmes d’enseignement ;
o l’organisation scolaire ;
o la recherche ;
o le support et l’animation pédagogique et andragogique ;
o le choix et l’utilisation des méthodes, des techniques et du matériel didactique ;
o la reconnaissance des acquis ;
o les applications pédagogiques de l’ordinateur » (CPNC, 2000, p. 14-15).

Le Plan de classification mentionne également quelques attributions caractéristiques de la fonction. L’ensemble de la description (deux pages) n’a pas changé depuis plusieurs années. En effet, on trouve une description identique dans le Plan de classification de 1989 (CPNC, 1989).

En somme, le conseiller pédagogique du collégial est un « consultant interne » (Denis & Ducharme, 1988; Pratte, 2001), lié à un établissement ; cela le distingue des conseillers pédagogiques aux ordres primaire et secondaire. « Cette institution [le collège] s’attend à ce qu’il endosse ses finalités, orientations et pratiques et qu’il fasse la promotion de celles-ci. Il doit respecter des règles et des procédures, travailler à l’intérieur de contraintes particulières et répondre à des commandes institutionnelles ou ministérielles » (Pratte, 2001, p. 32). C’est aussi un consultant dédié à un vaste domaine, c’est-à-dire tout ce qui touche l’enseignement et l’apprentissage dans un collège. Ajoutons que, « dans le domaine de la pédagogie collégiale, il existe peu d’expertise écrite6 sur laquelle baser son action et la conseillère ou le conseiller pédagogique doit souvent s’engager dans des démarches caractérisées par l’urgence, l’innovation, le risque et l’incertitude » (Pratte, 2001).

(L’auteure veut parler d’une base de connaissances validées, diffusée dans des écrits professionnels ou scientifiques.)

Ces descriptions s’avèrent très larges, suffisamment pour justifier une attribution de tâches qui laisse place à une grande variation du niveau de responsabilités (de l’influence au contrôle et au choix des orientations), du contrôle exercé sur d’autres membres du personnel (du soutien à l’évaluation), de l’autonomie ou du contrôle exercé sur son propre travail (de l’autonomie complète à une étroite supervision), du domaine d’intervention (des technologies à la pédagogie), des tâches assumées (de la consultation à la rédaction de politiques), etc. Ce caractère large et vague a pu laisser l’impression que les conseillères et les conseillers pédagogiques constituent une catégorie de personnel polyvalent, toujours prêt à répondre à des besoins de tous ordres (Laliberté, 1995b) et ouvrir possiblement la porte aux modifications fréquentes des tâches attribuées à ces personnes sans qu’elles puissent exercer le contrôle désiré sur l’évolution de leur fonction.

L’enseignement stratégique pour les nuls

Ouellet (1997) a élaboré six principes basés sur l’enseignement stratégique afin d’en faire un cadre théorique. Selon l’auteure, ces principes pédagogiques, basés sur les recherches en psychologie cognitive, facilitent l’examen critique de l’efficacité de l’action pédagogique auprès des élèves. Ces principes sont les suivants :

1.     L’apprentissage est un processus actif et constructif.

2.     L’apprentissage est essentiellement l’établissement de liens entre les nouvelles données et des connaissances antérieures.

3.     L’apprentissage concerne autant les connaissances procédurales et conditionnelles que les connaissances déclaratives d’un savoir ou savoir-faire apprendre.

4.     L’apprentissage exige l’organisation constante des connaissances, et cela, en fonction du mode de représentation particulier à chaque type de connaissances.

5.     L’apprentissage concerne autant les stratégies cognitives et métacognitives que les connaissances théoriques.

6.     La motivation scolaire détermine le degré d’engagement, de participation et de persistance de l’élève dans ses apprentissages.

L’école à l’ère des nouvelles technologies

 

Le rêve de Thierry Karsenti, qui est titulaire de la Chaire de recherche sur les technologies de l’information et de la communication en éducation, c’est que tous les élèves du Québec détiennent leur propre tablette tactile à l’école.

«Si on arrivait à doter chaque élève d’un outil informatique, on ferait un saut quantique comme société au niveau de l’apprentissage des jeunes», soutient le professeur de la Faculté des sciences de l’éducation de l’Université de Montréal.

Au Québec, il y environ 90 000 tablettes qui circulent dans les écoles primaires et secondaires. Pas moins de 500 de celles-ci se trouvent dans les écoles de la Commission scolaire de Montréal (CSDM). Elle les utilise avec les élèves du préscolaire et ceux qui présentent un handicap, une difficulté d’adaptation ou d’apprentissage. Les autres, inscrits dans les classes régulières, travaillent avec des ordinateurs portables qu’ils se partagent.

La Commission scolaire Marguerite-Bourgeoys possède de son côté quelques centaines de tablettes. Elle effectue présentement un projet pilote dans les classes de français de quatrième année de deux de ses écoles primaires.

Bien qu’il soit convaincu de l’apport positif des nouvelles technologies dans les classes, Thierry Karsenti poursuit ses études sur le sujet en visitant des écoles. Il s’intéresse en ce moment au processus d’écriture avec un ordinateur ou une tablette.

D’après vos recherches, comment les nouvelles technologies aident-elles les jeunes dans leur apprentissage du français?
Peu importe le prof de français, personne ne peut rivaliser avec le potentiel d’un correcteur. L’élève écrit son texte à l’ordinateur et le correcteur surligne des mots en vert et en rouge. Il ne donne pas seulement la réponse aux jeunes, il lui pose des questions. Est-ce que tel mot s’accorde? Est-ce qu’il prend un s? Ce feedback instantané, il n’y a aucun prof qui peut faire cela pour ses 32 élèves. Toutefois, les recherches qu’on a réalisées démontrent que, sans un accompagnement de l’enseignant, les jeunes vont ignorer les mots surlignés et ils vont trouver un moyen d’enlever le surlignage. Donc, il fera sensiblement le même nombre de fautes. Par contre, quand l’enseignant est derrière l’élève, il lui explique comment utiliser ces outils électroniques et le jeune apprend à faire moins de fautes parce qu’il a un feedback de l’outil informatique.

Ce qu’on a observé, c’est que parfois, des élèves vont ajouter des fautes parce qu’ils ont des choix à faire et qu’ils ne sont pas certains. Globalement, il y a 5% de fautes rajoutées, mais il y a 80% des fautes qui ont été enlevées.

Et cela n’empêche pas l’enseignant de faire un retour sur certaines règles et sur certaines difficultés rencontrées par les élèves à l’occasion.

Que pensent les enseignants de ces nouvelles technologies?
Il y a trois types d’enseignants: ceux qui ne croient pas aux technologies, ceux qui y croient plus ou moins et qui envoient les élèves seuls à l’ordinateur et il y a les autres qui accompagneront les élèves dans leur usage de l’informatique. C’est avec ces derniers qu’on a des résultats exceptionnels.

Les enseignants disent souvent que les élèves sont tellement bons à l’ordinateur. Non. Les élèves sont bons pour jouer et pour socialiser. Pas pour utiliser des logiciels de correction. Il faut vraiment leur montrer le potentiel des logiciels de correction. Et pas besoin d’avoir des logiciels aussi spécialisé qu’Antidote qui va parler d’anglicisme ou de québécisme.

Des enseignants de français nous ont demandé si les élèves apprennent vraiment avec les ordinateurs. Quand on a posé la question à des jeunes du primaire et du secondaire, ils nous disaient: «On n’est pas fous. Quand le correcteur souligne dix fois le même mot, on l’apprend».

«Je croyais que l’ordinateur personnel était mieux, mais les jeunes semblent vraiment séduits par la tablette. Elle est suffisante pour leurs besoins. Les jeunes sont tellement rendus bons en textos qu’écrire un texte de trois pages avec une tablette, ce n’est même pas une souffrance.» – Thierry Karsenti, professeur de l’Université de Montréal

Pourquoi des enseignants sont-ils réfractaires à l’arrivée des nouvelles technologies dans les classes?
Des enseignants que j’ai récemment rencontrés à Ottawa me disaient que les élèves ont besoin du papier et des crayons. Quand je questionne les élèves à ce sujet, ils me disent qu’ils n’ont pas vraiment besoin de sentir le papier et les crayons. C’est un mythe. Ces enseignants ont du mal à voir le potentiel d’une part. D’autre part, il y a une perte de pouvoir. Avant, c’était le prof qui disait si le mot était bon. Maintenant, il y a une espèce de démocratisation du pouvoir de l’enseignant. Toutefois, en bout de ligne, c’est l’enseignant qui va jouer un rôle central. Son pouvoir n’est pas perdu. C’est juste qu’il est un peu plus partagé.

Est-ce que les enseignants ont des problèmes de discipline avec l’arrivée de ces technologies dans leur classe?
Il y a deux problèmes majeurs. L’un concerne la gestion de classe, mais ça se règle facilement. Avec un prof qui reste à l’avant de la classe, les comportements divergents seront fréquents. Dès que le prof n’est pas intéressant, les élèves partent et se divertissent avec leur tablette. Le prof qui circule en classe, qui s’occupe de ses élèves, qui leur donne des tâches précises, qui établit des règles avec eux, doit composer avec des comportements divergents qui sont très limités. On est allé dans une école d’Estrie récemment. Le Wi-Fi est toujours ouvert. Tout le monde a son cellulaire. Pendant une journée complète, on n’a vu personne texter. Les jeunes nous ont dit qu’ils savent qu’ils peuvent utiliser leur cellulaire, mais que s’ils le font pendant les classes, il y aura des conséquences. Donc, ils le font pendant la récréation, mais pas pendant les cours. Dans d’autres écoles, c’est interdit en tout temps et tout le monde le fait. La distraction, c’est un défi de chaque instant.

L’autre problème, c’est que la technologie est synonyme de jeu. Ce n’est pas synonyme d’apprentissage. Dans les centres commerciaux, il y a des petits dans des poussettes qui jouent avec un iPad ou un iPhone. Dès qu’on leur enlève, ils se mettent à pleurer. On transporte cette mentalité à l’école. Enlever cette façon de penser, c’est tout un défi de la part de l’école.

Et les textos?
Les textos envoyés par les adolescents n’ont pas un impact négatif sur la qualité de leur français. Deux études en sont venues à cette conclusion.

  • La Chaire de recherche sur les technologies de l’information et de la communication en éducation a démontré en 2012 que les textos permettraient aux jeunes de découvrir de nouveaux mots grâce au correcteur automatique. Le point négatif qu’ont relevé les chercheurs, c’est que les textos nuisaient à la concentration des jeunes en classe.
  • La doctorante de l’Université du Québec à Trois-Rivières, Marie-Eve Gauthier, a rapporté en 2012 que plusieurs fautes de français et d’abréviations se retrouvaient dans les textos des jeunes, mais la qualité de leur français demeurait bonne. La chercheuse leur avait fait subir un examen de français.
  • De plus, malgré l’avènement des nouvelles technologies, le taux de réussite des élèves de cinquième secondaire à l’épreuve unique du ministère de l’Éducation est demeuré stable au cours des cinq dernières années, oscillant autour de 91%, nonobstant les critères de correction.
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La conseillance inversée pour le développement de la compétence professionnelle 8

Résumé de l’atelier offert aux cadres scolaire lors du congrès de l’ACSQ en 2013. Pour avoir accès au programme complet du congrès. cliquez ici!

LA CONSEILLANCE RENVERSÉE,
POUR LE DÉVELOPPEMENT DE LA COMPÉTENCE PROFESSIONNELLE 8
Clientèle Tous
Animatrice : Édith Guilbault, animatrice RÉCIT FGA et conseillère pédagogique TIC
La pédagogie inversée connait un succès grandissant ! De plus en plus de professeurs à travers le monde modifient leur façon de « faire la classe » pour passer à un modèle plus pratique et plus humain. Ce modèle résulte d’une idée très simple : le précieux temps en classe serait mieux utilisé si l’on s’en servait pour interagir et travailler ensemble plutôt que de laisser une seule personne parler. Ce modèle de gestion des apprentissages pourrait peut-être s’appliquer à la conseillance pédagogique, afin de développer la compétence professionnelle 8 chez nos enseignants. Nous avons donc commencé à mettre en place différentes structures facilitant cette approche comme de créer un environnement numérique d’apprentissage (ENA, Moodle), mettre des capsules pédagogiques en ligne, effectuer un suivi plus serré des transferts et la mise en application concrète des savoir-faire en classe. Venez découvrir les étapes de réalisation et le contrat de notre projet jusqu’à maintenant.

compétenceACSQ

 

L’apprentissage mobile en classe de français au secondaire

AQPF

Cette communication, donnée par Édith Guilbeault et Marc Côté, s’adressait plus spécifiquement aux conseillers et conseillères pédagogiques du secondaire.
Dans sa présentation, madame Guilbeault, de la Commission scolaire de Laval, rapporte que selon « The horizon report 2011 », il y a des tendances dont on doit absolument tenir compte dans le monde de l’éducation, car elles sont là pour rester. Qu’il s’agisse des livres numériques, des jeux sérieux ou de l’apprentissage mobile, le monde de l’éducation n’a pas le choix, il faut qu’il s’adapte pour garantir le développement des compétences des apprenants numériques qui sont maintenant dans les classes.
L’ère A.G. (avant Google) est révolue, affirme-t-elle à la blague, nous sommes à l’époque Podcast qui se caractérise par la souplesse et la mobilité. Trois mots définissent cette période : Whatever (n’importe quoi), Whenever (n’importe quand) et Wherever (n’importe où). Mais en quoi la mobilité est-elle un apport en éducation? À cette question, l’animatrice répond par un exemple : dans les réunions de famille, quand une question se pose, celui qui a un iPod trouvera la réponse en quelques secondes et deviendra la référence! S’ils sont plusieurs à en posséder un, une émulation ne tardera pas à apparaître.
Cette mobilité nécessite toutefois une organisation spatiale différente de la classe si nous voulons qu’elle soit optimale et la prudence demeure de mise dans l’utilisation de la mobilité. Madame Guilbeault considère qu’en classe, le iPad est l’instrument le plus versatile et le plus avantageux. Un seul bémol : beaucoup d’outils n’ont qu’un nom en anglais. À quand les équivalents en français?

Pour terminer, voici quelques suggestions d’outils numériques :
— pour le réseautage : Twitter, Flipboard, Podcast, iPaper;
— pour favoriser la collaboration : Googledocs, Evernote, Dropbox, tableau blanc interactif (TBI);
— pour la création : Creative Bookbuilder, Flipboard, Corbeau, Journaliste urbain;
— pour la lecture : iBooks, audiobooks, mes livres (Archambault), PDFnotes, ScanHD.
Nous sommes de plus en plus outillés pour faire face à cette vague numérique sur laquelle nous devons maintenant apprendre à naviguer.

Voir le programme du congrès en cliquant ici!